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Méthodes d’approche positives avec les lézards

Méthodes d’approche positives avec les lézards

Il existe beaucoup d’espèces de reptiles qui ne seront pas très familières au premier abord, cela vaut pour beaucoup de jeunes sauriens qui se sentent obligatoirement plus vulnérables étant petits et qui, forcément, n’ont pas encore l’habitude de l’Homme. Les reptiles ne sont pas des animaux domestiques et n’en deviendront jamais. Il existe toutefois des méthodes toute simple pour approcher certaines espèces de lézards en captivité.

Pourquoi habituer son lézard à l’Homme ?

Le but étant avant tout de les rendre moins farouches pour faciliter les examens, entretiens et soins basiques. Le deuxième principal objectif sera de réduire leur stress car ce dernier peut être constant si les animaux ont sans arrêt peur de nous voir. Le stress a des conséquences sur la santé de n’importe quel animal : après une maintenance inadaptée c’est l’une des causes principales de beaucoup de pathologies chez les reptiles en captivité, selon nous c’est l’un des points sur lesquels on peut s’améliorer en tant que soigneurs.

Cela simplifie aussi l’observation de son animal en période d’activité : un lézard qui a peur n’aura pas du tout le même comportement qu’un lézard désensibilisé. Nous pourrons plus en apprendre sur un animal calme que sur un animal stressé dont la principale préoccupation est de se cacher, nous le constatons au quotidien avec nos propres animaux : certains individus fuient et se cachent dès que l’on entre dans la pièce et attendent précautionneusement que l’on parte pour manger ou vaquer à leurs activités, d’autres ne se préoccupent pas de nous et continuent à se nourrir, à parader, à s’accoupler devant nous. Un des exemples les plus flagrants se trouve chez nos Varanus prasinus les plus calmes que nous stimulons par divers moyens ; par exemple un simple tube à essai avec un grillon au fond pourra amener l’animal à utiliser ses doigts pour tirer l’insecte vers lui, chose impossible à observer avec des spécimens peureux, ou même dans la nature…

 

Nos reptiles vivent en terrarium, ils ne sont pas à l’état sauvage. De notre point de vue il est impossible de recréer parfaitement leur milieu naturel en captivité (la plupart des lézards ont de grands territoires) l’animal en captivité ne pourra jamais vraiment fuir ou se défendre face à nous et peut vite se sentir acculé.

Pour toutes ces raisons nous nous employons à essayer d’habituer nos lézards à nous du mieux que l’on peut, il n’y a pas de science exacte à ce sujet : certains spécimens seront calmes tout de suite alors que pour d’autres le travail sera plus long et difficile. Nous nous efforçons juste d’apprendre à leur contact et de voir ce qui fonctionne ou ne fonctionne pas au fil du temps. C’est un sujet neuf et peu exploré, jusqu’ici les préoccupations tournaient surtout autour de la maintenance pure et simple des animaux, désormais nous avons des techniques fiables pour garder nos reptiles en bonne santé physiologique (nous obtenons de bons résultats de reproduction depuis des années), la suite logique est donc leur bien-être psychologique.

Peut-on habituer tous les lézards à l’Homme ?

Absolument pas. C’est une notion surtout relative à l’espèce et à l’âge des animaux. Une grande partie des animaux vont se calmer d’eux-mêmes au fil du temps à force de vous voir, d’autres vont avoir besoin de certaines conditions pour ça et d’avoir plus d’interactions avec vous. Le point clé sera l’observation : en observant son animal et ses réactions pendant plusieurs mois il sera possible de constater si des progrès sont possibles ou pas. Si ce n’est pas le cas il faudra alors permettre définitivement à l’animal de se cacher en lui fournissant un grand terrarium/enclos bien ornementé.

Une petite liste non exhaustive d’espèces qui souvent sont farouches étant bébés mais qui se calment souvent en grandissant : Varanus exanthematicus, Salvator merianae, Hydrosaurus sp, Eublepharis macularius, Correlophus ciliatus, Furcifer pardalis, Physignathus cocincinus, …

Une liste non exhaustive d’espèces qui vont rarement se laisser approcher de près : Sceloporus malachiticus, Phelsuma sp, Ptychozoon kuhli, Gonocephalus grandis, Chamaeleo calyptratus, Leiocephalus sp, Gekko gecko,

Tandis que certains sont très souvent calmes directement : Anolis porcus, Pogona vitticeps, Pogona henrylawsoni, Uromastyx sp, Chlamydosaurus kingii, …

Ces listes ne sont que des généralités faites à partir d’observations personnelles. Vous pouvez très bien avoir un Pogona farouche ou un caméléon casqué du Yémen parfaitement sociable. La seule certitude est que chaque animal a son caractère et cela vaut aussi pour les reptiles.

 

L’influence de la taille du terrarium chez certaines espèces

Pour la taille de terrarium il faut s’adapter à l’espèce, souvent les animaux se calment plus vite dans un terrarium de taille modeste avec peu de cachettes. C’est le cas de Varanus prasinus, nous l’avons expérimenté plusieurs fois : les juvéniles placés en petit terrarium peuvent se montrer fuyards mais sont globalement moins stressés que lorsqu’on les a placés dans un grand espace directement où ils deviennent généralement plus peureux et sur la défensive, tentant parfois même de mordre. Nous avons recensé ce comportement sur plusieurs jeunes qui devenaient systématiquement plus farouches dans cette configuration. En procédant comme ceci souvent au bout de quelques mois ils sont plus calmes, on les installe dans de plus grands terrariums une fois que l’approche est possible.

Dans le cas d’un spécimen importé : peu importe son âge nous conseillons de réduire aussi la taille du terrarium de départ, ne serait-ce que pour l’acclimatation ou la quarantaine. Il aura un accès simplifié aux proies, vous contrôlez mieux ce qu’il mange et surtout il tolère plus rapidement votre présence car il n’a pas d’autres choix : il ne peut pas se cacher en permanence. Votre lézard vous voit et c’est déjà la base de l’approche positive. Les espèces devenant facilement sociables avec l’Homme peuvent aussi aller d’emblée dans un grand terrarium comme les Pogona (en supposant que les animaux ont été démarrés et ne viennent pas de naître).

Attention aux espèces qui ont tendance à sauter violemment sur les parois comme Basiliscus plumifrons, Physignathus cocincinus ou Hydrosaurus sp par exemple, ces lézards peuvent s’abimer le rostre dans des terrariums trop petits. C’est aussi le cas des animaux fraichement importés qui seront très nerveux au début et peuvent aussi se blesser.

Aussi nous installons une plaque opaque sur la partie basse de la face avant pour éviter que les jeunes lézards s’abiment le rostre sur les vitres de devant. Ainsi les animaux ne voient pas à travers et n’essaient pas de passer à tout prix.

 

Quelques astuces pour désensibiliser son lézard

Voici quelques étapes (dans l’ordre) qui permettent au lézard de s’habituer à vous en douceur. Nous les avons expérimenté avec nos Varanus prasinus, Varanus macraei et pas mal d’autres espèces qui sont passées au magasin ou que nous avons à l’élevage.

Attention : pendant la période d’acclimatation d’un lézard importé (surtout adulte) nous conseillons de laisser l'individu seul le plus possible sans trop aller dans sa pièce, le but étant surtout qu'il se nourrisse normalement chez vous. Il faudra lui laisser des cachettes pendant l’acclimatation.

1.     Passez du temps devant le terrarium. Pour que votre lézard s’habitue à vous il faut déjà qu’il vous voit le plus souvent possible. Enlevez les cachettes pendant cette étape : si votre lézard peut se cacher cela sera bien plus long et fastidieux.

2.     Tentez de nourrir l’animal à la pince. Dès qu’il acceptera de prendre les proies ainsi, il va vite vous associer à quelque chose de positif : son alimentation. C’est l’un des meilleurs leviers pour habituer un saurien. S’il refuse, n’hésitez pas à proposer des proies plus appétentes en fonction de son régime alimentaire (souriceaux, œufs, fruits…). Pour nos Varanus prasinus nous proposons régulièrement des souriceaux englués dans du jaune d’œuf, surtout lorsqu’ils viennent d’arriver.

3.     Dès qu’il mange devant vous et avec vous, vous pouvez monter le niveau d’un cran : il va falloir faire sortir votre lézard pour le faire manger sur vous ou simplement hors de son environnement. C’est une étape de plus pour lui car vous lui demanderez de vous faire assez confiance pour monter sur vous ou pour sortir de la « zone de confort » qu’est son terrarium.  Bien sûr fermez la porte de la pièce et assurez-vous que, même s’il se promène un peu, il ne risque pas de trop se mettre hors de votre portée. Assurez-vous qu’il n’y a pas d’autres animaux en liberté dans la pièce et que rien ne puisse blesser votre animal.

Tendez-lui la proie et appâtez le en tendant l’autre bras pour l’inciter à monter dessus. Commencez déjà par le faire sortir pour attraper la proie et laissez-le manger où il veut. Il faudra augmenter la distance entre lui et son terrarium petit à petit. Au final, il sera capable de manger n’importe où dans la pièce, sur vous ou non.

4.     Effleurez-lui le dos pendant qu’il mange pour le désensibiliser au toucher. Au début il pourra tenter de fuir, arquer le dos ou même lâcher la proie. En faisant ça il tolèrera bien mieux les manipulations plus tard. C’est une étape qu’il ne faut aborder que si l’animal se nourrit sans aucune difficulté.

5.     Inventez des techniques pour stimuler l’animal. Cela vaut surtout pour les varans même si d’autres lézards très gloutons peuvent aussi y être réceptifs. Régulièrement nous nous amusons à « cacher » des proies hors du terrarium avec nos varans les plus sociables, nous les mettons dans des récipients, dans nos poches de pantalon ou autres et les animaux passent du temps à chercher les insectes. Cela les stimule beaucoup et nul doute qu’il est positif d’amener l’animal à se servir de ses prédispositions naturelles pour chasser même s’il est en captivité.

 

Après tout ça votre lézard sera certainement moins stressé lorsque vous vous occuperez de lui. Gardez à l’esprit que même s’il est parfaitement « apprivoisé » il ne faut pas le harceler continuellement, il doit avoir ses propres activités sans forcément être touché, caressé ou tenu. Vous pourrez le sortir quotidiennement s’il est calme et le laisser explorer la pièce où se trouve son terrarium ainsi vos interactions n’en seront que plus fructueuses et votre animal ne vous associera pas à quelque chose de désagréable.

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